7.5/10K, l'ivresse des sommets

/ Critique - écrit par juro, le 29/08/2006
Notre verdict : 7.5/10 - Au K par K (Fiche technique)

Tags : taniguchi sommet montagne jiro sommets dieux manga

C'est simple comme le destin d'un homme peut être bouleversé par les événements de la vie, aussi brusquement qu'une avalanche peut emporter votre compagnon de cordée. Comment y rester indifférent ? Comment rester de marbre face à cela ? Impossible. Deux solutions s'imposent : la fuite vers ailleurs ou la confrontation pour se racheter et essayer d'expier la faute dont on se sent coupable. La montagne est seule juge, l'homme subit le verdict, pas de deuxième chance. Sauf pour K, un homme mystérieux qui grimpe les sommets comme un supplice de Sisyphe. Un recueil de nouvelles sur l'alpinisme signé - une fois de plus - Jirô Taniguchi.

Renverser les montagnes

K
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Le sommet du K2 n'a jamais été atteint à partir de sa face nord. C'est pourtant par cette voie, réputée inviolable, que choisit de grimper le jeune Nawan Door, fils d'un magnat du pétrole. Mais, lorsqu'il chute à quelques mètres du sommet, qui pourrait le secourir ? Un seul nom vient à l'esprit des sherpas : K ! On le surnomme K, mais personne ne connaît ni son vrai nom ni son passé. K vit avec la montagne, il est même capable d'entendre la voix... la voix des dieux ! Pourra-t-elle le guider ?!

Après avoir fait paraître Le Sommet des Dieux, Kana joue le doublon avec K si ce n'est qu'ici Jirô Taniguchi se plait à nous conter de courtes histoires, sortes de mini one-shot avec un personnage récurrent. K, alias Kôshi Ichinose, a décidé d'abandonner le Japon et de résider au pied des grands monts himalayens pour expier une faute commise dans le passé. Aguerri aux plus fines techniques d'alpinisme, le personnage se montre dans la plus pure tradition des héros du mangaka : sobre, l'oeil un peu éteint, profondément nostalgique derrière ses non-dits, en marge de tout conventionnalisme. Sans déroger à la règle, ce personnage se montre peut-être l'un de plus réussis de la bibliographie de Taniguchi par son côté « jusqu'au boutiste » et sa peine à s'infliger une auto flagellation en gravissant des sommets inaccessibles. Et bien évidemment, on retrouve l'aspect du combat symbolique contre la nature...

Sauvetage de l'extrême

Le scénario se renouvelle difficilement avec des missions de sauvetage de l'extrême en altitude. Malgré tout le talent du scénariste pour donner une connotation différente à chacune, l'impression de tourner en rond se ressent. Pour un événement ou un autre, K monte un des sommets les plus élevés ou dangereux de la région et réussit des exploits pas miraculeux mais juste empreints de bon sens humain... et une pointe de chance. Parfois léger, le scénario ne s'évapore pas pour autant. Bien au contraire, il fait progresser le personnage principal, véritable plaque tournante du manga même si le dénouement apparaît cyclique d'une histoire à l'autre.

Rien à redire au niveau du dessin, ceux qui auront apprécié Le sommet des Dieux retrouveront Taniguchi au meilleur de sa forme pour un recueil des plus prolifiques en superbes paysages montagnards et de pleines pages surdétaillés. Le prix de ce volume unique se mérite amplement à force de jeter coup d'oeil à la technicité du maître. Par ailleurs, l'édition de Made in Kana est superbe - comme toujours - et pourrait se targuer d'être l'un des plus réussies de l'édition française du monde du manga avec ce grand format.

Il manque à K ce petit quelque chose que les autres oeuvres de Taniguchi dégageaient mais le recueil constitue certainement l'un des compléments essentiels à son oeuvre principale sur le sujet. Car K reste sur un goût d'inachevé, une sorte de transition pour palier la fin du Sommet des Dieux...