Mon voisin Totoro
Manga / Critique - écrit par Jade, le 31/01/2005 (Tags : totoro film ghibli voisin studio miyazaki animation
Le troisième film de Miyazaki, après Nausicaa et Le Château dans le Ciel, sera celui de la consécration. Mon Voisin Totoro aura un succès interplanétaire dès sa sortie en 1988. Les figurines à l'effigie du monstre et de ses petits copains se vendent encore aujourd'hui comme des petits fours, et il est inutile de rappeler le nom de la fondation écologique créée par Miyazaki peu après la sortie du film (Fondation Totoro, donc, pour ceux qui suivent pas). Mais plus que tout, Totoro deviendra le mythique symbole de la maison de production Ghibli, qui commence à battre de ses propres ailes à la sortie du long-métrage.
Outre ces considérations bassement matérielles, Totoro est aussi un sublime dessin animé, une déclaration d'amour au merveilleux de l'enfance et de la nature, valeurs à conserver en toutes circonstances.
Satsuki et Mei sont deux soeurs d'environ 12 et 7 ans. Elles emménagent avec leur père dans une maison à la campagne, leur mère étant à l'hôpital, atteinte d'une maladie grave indéterminée. Très vite elles feront la connaissance d'un voisinage pour le moins étrange, et notamment de l'imposant Totoro.
Mais qui est donc Totoro ? Ce croisement incertain entre un grizzli et une marmotte des landes devient très vite l'ami des deux petites filles et semble passer le plus clair de son temps à glander dans le creux du plus grand arbre de la faune environnante. Sous ses airs de dormeur avéré, il dispose de pouvoirs gigantesques et de relations très influentes parmi les créatures de la forêt. Un véritable ami que ce Totoro, qui découvrira notre monde (notamment dans l'excellente scène devant l'arrêt de bus sous la pluie) tout en faisant découvrir le sien à deux petites filles à la curiosité sans limite.
Voilà concrètement ce que l'on sait de ce personnage énigmatique sous bien des aspects. On ne peut réellement définir sa nature : est-il issu de l'imagination débordante des deux petites chipies ? C'est peu probable, car un bon nombre d'actions perpétrées par Totoro ont un écho sur la réalité', et si personne d'autre que Satsuki et Mei ne le voient en chair et en os, son existence n'est jamais clairement niée par les adultes. Tel une fée, le gracieux Totoro n'existerait que si l'on croyait en lui, et qui d'autre que les enfants pour lui permettre d'exister ?
Totoro, c'est bien plus qu'un simple nounours gentil : c'est le pouvoir de l'imagination en action, capable de faire face aux plus dures réalités, et ce, toujours avec le sourire. Il résume donc à lui tout seul la philosophie développée dans le film. Il est aussi, avec le personnage de Mei, l'élément comique fondateur de l'oeuvre. Sa tête gentiment ahurie, ses expressions faciales et corporelles souvent très recherchées vous feront bien rire, tout comme ses joyeux compagnons.
Mais, n'en déplaise aux fans de la mascotte des studios Ghibli, ce sont les deux enfants les héroînes de l'histoire. Satsuki, par son aspect débrouillard et sa bonne humeur, se range clairement dans la lignée des héroïnes Miyazakiennes, au caractère souvent bien trempé. On la voit tout au long du film grandir, s'émanciper dans un environnement où elle se sent parfaitement à l'aise. La petite Mei émerveille quant à elle, par sa témérité sans limite devant l'inconnu, seulement comparable à sa curiosité, typique de son jeune age.
Le film s'attarde beaucoup sur elle, et doit beaucoup à sa personnalité qui prend souvent un aspect comique. Le simple fait de la voir harceler les pauvres êtres de la forêt - dont Totoro himself - dans un but purement éducatif rend cette petite furie irrésistible. Même dans les pires moments, elle reste un personnage profondément drôle et attendrissant (il n'y qu'à la voir déambuler avec son épi de maïs collé au coeur pour s'en convaincre).
Mon Voisin Totoro est une oeuvre partiellement autobiographique, la mère de Miyazaki ayant été hospitalisée pendant sa jeunesse, tout comme la mère des deux enfants. On peut même penser qu'il s'agit du dessin animé le plus personnel du réalisateur, car il délaisse le fantastique pour se rattacher à la réalité, en l'occurrence le quotidien de deux enfants. Le tout avec une qualité graphique faisant honneur aux studios Ghibli. Difficile de croire que le film a déjà plus de quinze ans.
Ce film fût l'objet d'une grande révolution dans le monde de l'animation à sa sortie (sauf chez Disney, toujours imperméable aux fluctuations extérieures, allez savoir pourquoi), et notre ami Totoro est bien parti pour hanter nos mémoires pour un bon bout de temps.