Les Ki-oon du mois de mars 2015
Manga / Critique - écrit par OuRs256, le 21/05/2015Tags : manga mars oon vol calendrier auteur nouvelle
Le mois en deux mots trois mouvements : (mute), lapin blanc, jeu de la mort, combats épiques, Histoire, automne, (censuré)
A Silent Voice 1 & 2 : Beaucoup (bon OK, mes 50 lecteurs fidèles !) s’étonnent peut-être de ne pas avoir vu une critique de ce titre sur le site beaucoup plus tôt (il y a quand même eu un gros buzz autour de la série) mais je vais tâcher de combler mon retard et de vous en parler avec justesse. A Silent Voice ou Koe no Katachi pour les puristes est un shônen (si, si, je vous assure) qui nous raconte l’histoire et surtout la rencontre de deux « Shosho ». Le premier est un garçon qui s’appelle Shoya Ishida. Ce dernier est particulièrement immature et va persécuter la jeune Shoko Nishimiya, une jeune fille sourde depuis la naissance. Alors qu’au début, tout commence par de petites taquineries, les brimades vont très rapidement s’intensifier. Ce n’est pas nouveau, les enfants ayant beaucoup de mal à comprendre les sentiments complexes, il n’est pas rare qu’ils soient vraiment méchants entre eux. Dans le cas de Shoko, ça va peut-être même encore plus loin. La société japonaise étant ce qu’elle est, la culture de la gagne et de l’avancement est inculquée dès le plus jeune âge. Les mauvais traitements s’intensifient donc encore plus à partir du moment où Shoko est considéré comme un boulet qui ralentit les autres. Le handicap de la jeune fille possède donc un rôle important dans la première partie de la série. L’auteur dépeint une classe particulièrement violente, psychologiquement et parfois même physiquement quand Shoya lui prend ses appareils auditifs et les jette dans la rivière, « juste pour voir ». Jamais la jeune fille ne se plaindra, au contraire, elle tentera toujours d’aller vers les autres, même si ces derniers la rejette. Eh oui, vous l’aurez compris, le personnage créé par Yoshitoki Oima possède une force de caractère assurément digne de tout personnage de shônen. Cependant, pour moi, A Silent Voice, c’est avant tout une histoire d’amour. Le duo formé par les deux Shosho va vite se rendre compte d’une attirance mutuelle et tout à coup, le handicap de Shoko ne sera plus vraiment un problème. Au contraire, il va permettre à Shoya de lui témoigner presque plus d’attention et une dévotion sans faille (eh oui, cette fois, c’est lui qui a le droit à sa caractéristique de personnage de shônen !). L’auteur parvient à exprimer la romance de manière subtile (par une action banale ou même un simple geste) et surtout sans réellement mettre à profit sa réserve substantielle de pathos. Oima ne tombe donc pas dans la facilité et nous propose une histoire poignante et particulièrement positive dans son évolution. Avec cette nouvelle série, la collection shônen de Ki-oon a le droit à un nouvel ajout de poids pour trôner aux côtés de Dragon Quest Embelli of Roto, Run Day Burst et autres A Certain Magical Index !
Alice au Royaume de Joker 1 : Après le royaume de coeur et celui de trèfles, il est temps pour Alice d’aller vers celui de Joker. Enfin, ce n’est pas tout à fait vrai puisque c’est Joker qui vient à elle. Ce dernier est un clown qui vient de débarquer à Wonderland avec son cirque et qui va embarquer la jeune fille un peu malgré elle dans un jeu plus dangereux que ce qu’elle n’imaginait… Lecteurs des deux précédentes séries, êtes-vous aussi perdus que moi ? Alors qu’on avait deux séries qui se suivaient à peu près, j’ai eu énormément de mal à situer cette troisième « saison » (je ne sais même pas si on peut vraiment en parler). Boris ? Alice n’en a cure. Blood ? Alice ne lui prête pas la moindre attention non plus… C’est étrange d’avoir une telle remise à zéro mais ça permet aux nouveaux lecteurs de se lancer sans trop se soucier des séries précédentes, après tout… pourquoi pas ? En creusant un peu, on se dit que c’est un peu comme dans les jeux de drague à la Japonaise où on peut changer le cours des événements avec quelques choix et obtenir de nombreuses fins diverses et variées. C’est la troisième fois que QUINROSE pose les bases d’un nouvel arc et ça se sent. Le tout se fait assez rapidement et efficacement. On oublie donc les quelques volumes un peu longuet d’Alice au Royaume de Trèfles et on essaie de faire confiance au dessinateur que l’on connaît bien puisqu’il est le même que dans la précédente série. On prend les mêmes et on recommence de manière légèrement différente, c’est un peu ça la marque de fabrique de ces adaptations d’Alice in Wonderland !
Darwin’s Game 4 : La chasse aux anneaux continue dans le quatrième opus des aventures de Kaname. Ce dernier ayant battu le Fleuriste, il va devoir réfléchir à une méthode pour survivre. C’est alors qu’il se rend compte que les explications sur la façon de finir le jeu sont très vagues. Il y a peut-être quelque chose qui se cache derrière tout ça… L’heure n’est plus au jeu solo mais à l’alliance. Kaname l’a compris et essaye de rallier d’autres joueurs à sa cause un peu comme Sumio dans Enigma en fait. Il réussit à tirer le meilleur des capacités de chacun de ses alliés et se propose d’ouvrir des nouvelles portes et leur permettre d’avancer. Les auteurs mettent donc de côté l’aspect « massacre » du titre pour développer un peu l’histoire et les personnages. Les alliances formées ne sont pas anodines et certaines rancoeurs vont même être à l’origine de collaborations que l’on aurait pas cru possibles. Darwin’s Game est un titre intrigant qui n’évolue pas de manière prévisible, c’est tant mieux dans la mesure où on obtient un titre clairement axé seinen avec un mélange de réflection et d’action réussi.
Dragon Quest - Emblem of Roto 8 & 9 : Arus a décidé de se lancer tout seul dans un combat désespéré contre le roi des carnassiers et ses légions de monstres. Heureusement, il est rapidement rejoint par ses alliés, Kira y compris. Le jeune garçon débarque (presque comme une fleur) en pleine possession de sa nouvelle force. Il a maintenant pleine conscience de sa qualité de seigneur de la lame et compte bien montrer ses nouveaux pouvoirs dans la lutte contre Gunung et ces cinq généraux (ce n’est pas le menu fretin qui va lui permettre de s’illustrer). Etant un grand fan de La Quête de Daï, il est très difficile pour moi de lire Roto sans y penser et pour le coup, ce n’est pas forcément une mauvaise chose. Alors oui, Gunung est carrément moins classe que Crocodine mais il est bien plus légitime dans sa position de Roi des carnassiers. Gunung est sans pitié et n’hésite pas à fomenter les plans les plus diaboliques pour défaire Arus. En somme, c’est un vrai méchant (ce que n’est pas du tout Crocodine qui passe même du côté du bien après sa rencontre avec Daï). Kamui Fujiwara nous offre donc un vrai combat, violent, tendu et haletant en utilisant les antagonistes avec un talent certain. Il parvient à donner un véritable rôle à chacun des alliés et ne fait pas en sorte qu’Arus « crève l’écran » comme on aurait pu l’imaginer. En fait, l’action choc du héros était plutôt d’aller de lui-même livrer un combat qui était perdu d’avance. Pour Fujiwara, c’était un acte héroïque suffisant, il n’était pas nécessaire d’en faire trop pendant le combat et il avait raison. On soulignera aussi son trop bon découpage qui renforce le dynamisme de ses scènes bien comme il faut. Au final, on se retrouve avec deux tomes bien exploités et particulièrement efficaces. C’est beau, agréable à lire et la fin est assez intrigante pour nous donner envie de nous plonger dans la suite… Que demande le peuple ?!
Le Requiem du Roi des Roses 1 : Avez-vous déjà entendu parler de Richard III ? Non ? Peut-être en cours d’Histoire ? Ce Roi d’Angleterre est le dernier véritable représentant de la maison York et de sa rose blanche pendant la guerre des roses. Il doit cependant sa « notoriété » outre manche à un autre événement puisqu’il est tenu responsable du meurtre de ses deux neveux (les fils de son frère Edward IV) qu’il aurait enfermé dans la Tour de Londres, à l’époque à moitié palace et à moitié prison. Aya Kanno revient donc chez nous avec une adaptation libre de deux pièces de Shakespeare inspirées de ce pan de l’Histoire britannique et c’est avec un oeil curieux que l’on découvre cette auteure dans un registre totalement différent. Souvenez-vous, sa première série n’était autre qu’Otomen (chez Delcourt), un titre humoristico-dramatique avec une ambiance totalement différente. Dans Le Requiem du Roi des Roses, on le sent dès les premières pages, l’atmosphère est pesante à cause de ce personnage principal à l’apparence (et au destin) funeste. Richard possède une physionomie particulière : un corps « entre l’homme et la femme », des yeux verrons… Il fait presque peur et son caractère introverti et dissimulateur ne vient pas jouer en sa faveur. En même temps, on sent une forte influence de sa mère qui ne lui prodigue absolument aucune preuve d’amour. Au contraire, elle passe son temps à lui répéter qu’il fait partie de la pire engeance de l’humanité… Le premier tome pose bien les bases de l’histoire avec une présentation des forces en présence faite sous un angle intéressant. Le récit est, en effet, ponctué de flashbacks qui permettent de compléter les informations données aux lecteurs via les dialogues. Le tout commence à s’accélérer un peu à la fin pour qu’on puisse enfin voir Richard en action (son tempérament guerrier bouillonne) et laisse présager une suite de très bonne facture. Aya Kanno fait donc un retour surprenant en France avec une série différente mais ô combien meilleure aux yeux des fans d’Histoire et de culture britanniques dont je fais, bien évidemment, partie.
Pandemonium 2 : Retrouvez la critique complète de ce titre dès la semaine prochaine sur Krinein !
Poison City 1 : Invité au Salon du livre 2015, le nouveau Tsutsui est arrivé et le premier opus de ce diptyque ne fait pas moins de 230 pages ! Après des problèmes de société plus localisé, l’auteur tente de s’opposer cette fois à la censure. Certaines de ses oeuvres ayant été censurées, en particulier dans le département de Nagasaki, il a tenté de comprendre comment fonctionnait ces organes qui choisissaient certaines oeuvres plutôt que d’autres. Dans Poison City, le lecteur se trouve transporté juste avant les JO de Tokyo (qui auront lieu en 2020), au coeur d’une société toujours aussi à cheval sur l’étiquette, si ce n’est plus. Pour ne pas que les Japonais ne paraisse pas dérangés aux yeux des populations du monde qui arpenteront bientôt les rues de Tokyo, le gouvernement décide de faire passer une loi pour une « littérature saine ». Un comité sera chargé de la faire appliquer et donc de mettre un sceau positif ou négatif sur chaque oeuvre. Mikio Hibino va en faire les frais et son éditeur va se retrouver en bien mauvaise posture… Même si Tsutsui nous a proposé quelque chose d’un peu moins bon que Manhole avec Prophecy, il ne m’a, personnellement, jamais vraiment déçu. Avec ce nouveau titre, on retrouve l’auteur des grands jours dans la narration mais aussi dans les personnages. On suit à la fois le manga de Mikio et son évolution après chaque réécriture imposée par l’éditeur qui tente, tant bien que mal, de se conformer à la loi, mais aussi le parcours de Mikio en tant qu’être humain opposé à ce système de censure qui bride complètement la créativité de l’auteur. Planche après planche, correction après correction, rien n’y fait, le titre ne parvient pas à être assez bon pour ne pas être considéré comme « nocif », ce qui ne va pas aider les élans justiciers de Mikio qui va se décider à trouver des moyens détournés de publier son oeuvre. Je pondrais évidemment un avis définitif une fois les 2 tomes en main mais je pense que je peux d’ors et déjà dire que ce Poison City est une belle réussite !