Area 51 - Mulder et Scully peuvent aller se rhabiller.

/ Critique - écrit par OuRs256, le 08/04/2015

Tags : vie france mulder mise film sante monde

En France, bien rares étaient ceux qui connaissaient le nom de Masato Hisa avant le début de cette année 2015 et on ne peut que remercier les éditions Glénat et les éditions Casterman de nous le faire découvrir en France. Attention.. hit en puissance !

Janvier 2015 : Coup de génie des éditions Glénat avec la sortie du premier tome de Jabberwocky, petit bijou de « japoniaiseries » comme on les aime avec des dinosaures (russes -spécial dédicace à @Sedeto), des complots et une ligne directrice « plus random tu meurs » ! Casterman fait encore plus fort en nous offrant la dernière oeuvre du maître. Dites-vous qu’il a eu le temps de parfaire son style graphique atypique et de nous trouver un scénario aux possibilités encore plus nombreuses…  

Area 51 - Mulder et Scully peuvent aller se rhabiller.

Commençons par le commencement… Qui est Masato Hisa ? On ne sait pas grand chose sur cet homme si ce n’est qu’il a remporté le prix du meilleur mangaka débutant attribué par le magazine de prépublication Afternoon. Sa première série débute en 2003 et se nomme Grateful Dead. En lisant ses oeuvres, on se rend compte qu’il apprécie probablement le travail de Frank Miller sur des titres comme Sin City mais surtout les polars et films noirs en général. Au niveau de l’ambiance, on serait presque dans du Kaneko en mode ultra-spécialiste. Là où l’auteur de Wet Moon mélangeait un peu les genres dans une tendance plus « indé », Masato Hisa reste toujours très sombre pour créer cette atmosphère si chère à des réalisateurs comme Welles, Huston et même Hitchcock (il a eu sa période). Si on veut rester dans le manga, on pourrait dire qu’on la retrouve dans un titre comme Trouble is my Business de Taniguchi (paru en France aux éditions Kana).

Venons en au fait... De quoi que ça cause donc Area 51 ? Essayez d’imaginer que toutes les divinités que vous connaissez (toutes religions confondues), toutes les créatures mythologiques et folkloriques ou légendaires existent réellement. Vous me suivez ? Pour faire simple, toutes les créatures dont on vous a parlé un jour sont bien réelles. Où est-ce qu’elles vivent ? Eh bien… *Mode Julien Lepers ON* TOP ! « Je suis le secret le mieux gardé des Etats-Unis, une zone où personne ne peut pénétrer. On m’a utilisé dans de nombreux films et autres légendes urbaines. Mulder et Scully ou même Indiana Jones vont tenter de me trouver. Je suis… Je suis…  LA ZONE 51. Oui Oui Oui Oui ! » * Mode Julien Lepers OFF* Fiouu… C’était épuisant. Area 51 est donc une ville fantôme des Etats-Unis où vivent les monstres les plus fous mais que. On y trouve aussi certains humains et parmi eux, Tokuko McCoy, une jeune femme devenue détective privée, la « zone » n’étant pas un endroit où tous peuvent vivre dans la joie et la bonne humeur… 

Si vous avez bien suivi, vous avez compris que scénaristiquement, Masato Hisa peut faire N’IMPORTE QUOI. J’insiste sur ce trait « aléatoire » parce que l’auteur ne se prive pas. McCoy se retrouve embarquée dans une guerre des gangs, dans une affaire de paris truqués mais aussi d’adultère « animal ». La variété amenée par le nombre potentiel de créatures est tout simplement dingue, surtout quand on voit que l’auteur ne reste pas dans la facilité et mélange vraiment tout à sa sauce. Il ne choisit pas non plus la facilité en prenant les monstres les plus connus. Au contraire, il va puiser dans les plus sombres recoins de chaque mythologie pour surprendre son lecteur encore et encore. De plus, Masato Hisa ne délaisse pas les personnages secondaires pour autant. On ne laisse pas une jeune femme toute seule voyons ! Elle est aidée par un kappa du nom de Kishirô même si « aidée » est un bien grand mot, ce dernier lui attirant plus souvent des problèmes qu’autre chose. Les clients de McCoy voient souvent leur background développé pendant la mission, chose assez classique mais Hisa se permet de pervertir un peu (ou du moins d’exacerber au maximum) le trait de caractère qui définit ces derniers. Ainsi, on découvrira un dieu Râ à la limite de la justice, prêt à tout pour préserver les apparences (un peu comme le PDG d’une grande société) et des kappa pas particulièrement pervers mais à la couardise renversante. En tout cas, avec son vivier illimité, Hisa a de quoi faire et ne manquera probablement pas de nous surprendre dans les tomes à venir.

J’aurais mis quatre paragraphes avant de vous le dire mais vous devriez savoir si vous appréciez Hisa assez rapidement. En effet, son style graphique atypique ne sera pas apprécié par tout le monde. Il faut clairement un petit moment pour s’y faire (sauf si vous avez déjà lu Sin City et que vous êtes déjà accro au style graphique), surtout dans Jabberwocky où on voit qu’il tâtonne encore un peu. Dans Area 51, la lisibilité est tip top. On voit qu’il a passé pas mal de temps à épurer ses aplats pour arriver à un résultat optimal. Quand on compare le premier volume de cette nouvelle série avec le titre sorti chez Glénat, la différence est évidente. Attention, ça ne veut pas pour autant dire que l’autre est mauvaise, c’est un peu la même chose qu’en lisant un petit One Piece. Quand on lit le tome 3 et le tome 73, c’est le jour et la nuit, simple question de progression ! Une fois qu’on est dedans, c’est l’éclate totale par contre. Les fans d’action ne pourront que saluer l’apport de ce style de dessin atypique qui rend la narration ultra dynamique (vas y que je te balance des rimes en -ique). Le lecteur est baladé par des mouvements nets et précis qui passent par un découpage sans chichi et d’une efficacité redoutable. 

Area 51 - Mulder et Scully peuvent aller se rhabiller.

La morale de tout ça ? Avec le paragraphe précédent, je pense que c’est évident mais j’ai énormément de mal à trouver des mots assez forts pour exprimer tout le bien que je pense de Masato Hisa mais surtout de ce nouveau titre publié chez Casterman (qui semble abandonner le « label » Sakka). L’auteur m’avait déjà séduit avec Jabberwocky mais je dois avouer que la lecture d’Area 51 m’a fait comprendre dès les premières pages que je me trouvais face à ce qui pourrait bien être MON titre coup de coeur de l’année 2015 (rien que ça) et peut-être même 2014 tiens (même s'il faut avouer qu'elle n'était pas terrible). Original, drôle, riche en action et génialement bien écrit - il en devient difficile de lui trouver des défauts, Area 51 fait partie de ces petites perles dont j'aurais beaucoup de mal à me passer dans les mois à venir... Maintenant, on veut Nobunagun et Grateful Dead… Et plus vite que ça !