La France dans le Japon - Diaspora française dans le manga (6)
Manga / Dossier - écrit par OuRs256, le 19/09/2013Il arrive que certains personnages soient utilisés hors contexte pour des raisons de prestige ou pour donner un certain caractère aux personnages. Comme on va le voir avec les exemples à suivre, les Japonais ne manquent pas d’idées pour transformer nos figures historiques et les intégrer dans des contextes multiples.
Chapitre 5 : Dans le manga - Afterschool Charisma, Drifters, Golgo 13.
Afterschool Charisma (放課後のカリスマ), Kumiko SUEKANE, Ki-oon.
Mais qui est donc Shiro ?
L’Académie St Kleio est, d’apparence, une institution tout ce qu’il y a de plus normale. Mais ses murs abritent en réalité des élèves pour le moins particuliers... En effet, tous sont des clones de personnages historiques ou ayant accompli de grandes choses. Enfin... pas exactement : un étudiant tout ce qu’il y a de plus ordinaire, Shiro Kamiya, vient d’y être transféré. C’est donc à travers les yeux de ce nouvel arrivant que nous verrons la façon d’agir des clones et leur façon d’interagir avec lui. Comment ces derniers vivront-ils cette «intrusion» dans un quotidien qui était censé être tout tracé ? Un clone aspire-t-il au même futur que son modèle ? Comment un individu normal peut-il côtoyer des sommités comme Jeanne d’Arc, Napoléon, Mozart, Marie Curie, Elizabeth I ou même Hitler, sans que son égo en soit affecté ?
Le thème de cette série est assez étonnant à première vue et l’utilisation de personnages célèbres donne un côté intrigant et étrange. Au fur et à mesure qu’on avance un peu, on est saisi par une sorte de déception puisque les personnages ne ressemblent pas du tout à leurs originaux. Même si Jeanne d’Arc est présente (oui, encore !), elle se reconnaît par ses actions et non par son apparence. C’est aussi le cas de Napoléon et de Marie Curie.
Les clones se posent de nombreuses questions sur leur existence. Marie Curie se demande pourquoi elle est Marie Curie et pourquoi elle ne pourrait pas faire de la musique plutôt que de la chimie. Voir les clones douter sur leur avenir (qui est censé être tout tracé) est assez intéressant et chaque remise en question reste en adéquation avec le caractère original du personnage. C’est donc une présentation assez atypique que nous fait Kumiko SUEKANE et radicalement différente de tout ce que l’on peut trouver ailleurs.
Drifters (ドリフターズ), Kohta HIRANO, Tonkam.
L'un des plus gros ovnis récents.
Drifters est un manga encore assez jeune puisque seuls deux volumes sont sortis (au Japon et en France). Toyohisa Shimazu est un jeune samurai participant à la bataille de Sekigahara. À l’article de la mort, il est catapulté dans un étrange bureau à partir duquel il est envoyé dans un monde peuplé de créatures qui ressemblent à des elfes. Blessé, il est soigné par deux villageois avant d’être trouvé par un autre être humain «intrus» dans ce monde : Yoichi Nasu (un seigneur de guerre de l’époque Sengoku) qui le ramène chez celui qui semble être son guide : Oda Nobunaga. Ensemble, ils doivent se battre contre un mystérieux spectre appelé le Roi Noir qui emploie, lui aussi, des pointures : Hijikata (ancien membre du Shinsengumi), Jeanne d’Arc et Anastasia Nikolaïevna (la princesse russe).
Le personnage qui nous intéresse le plus est évidemment Jeanne d’Arc qui est accompagnée de son fidèle acolyte : Gilles de Rais. L’homme considéré comme l’un des plus grand tueurs de France possède dans le manga une force diabolique qui en fait un colosse très difficile à abattre. Cependant, ce n’est qu’un personnage secondaire et le traitement accordé à Jeanne est bien plus intéressant. Puisqu’elle a péri par le feu, l’auteur s’est dit que ce serait une bonne idée d’en faire son pouvoir. Ce n’est donc pas une Jeanne craintive des flammes que l’on retrouve mais une véritable pyromane, enivrée par son pouvoir.
Le colosse Gilles de Rais est un personnage sur lequel HIRANO a fait un travail remarquable. Sur son corps, on peut lire certaines parties de la Bible en latin (on les voit très bien sur la version originale). Le dessin de Jeanne reste assez classique même si elle est à des années lumières de la version de YASUHIKO dans Jeanne.
Golgo 13 (ゴルゴ13), Takao SAÎTO, Glénat.
Il est prêt à tuer à tout moment.
Avec ses 167 volumes parus (chiffres du mois d'août 2013), Golgo 13 est l’un des plus vieux manga (le record est pour le moment détenu par Kochikame d’Osamu Akimoto qui vient de voir son tome 187 arriver dans les librairies japonaises sous peu) encore en cours de parution (le prochain volume paraîtra au mois d’août). Golgo 13 raconte l’histoire d’un tueur à gages censé mener ses missions avec un taux de réussite de 100% pour peu qu’on verse la somme qu’il demande. Il choisit lui-même ses missions et peut refuser un contrat s’il le souhaite. Son existence est entourée de mystère et même son nom, Duke Togo, est sujet à de multiples remises en doute.
Pourquoi évoquer un tel manga ? Tout simplement parce que son métier le mène partout, y compris en France et c’est l’occasion pour Takao SAITÔ de représenter la campagne normande ou même la région bordelaise et les Calanques marseillaises. Évidemment, on ne compte plus les multiples apparitions parisiennes du tueur à gages le plus célèbre du Japon.
Pour vous donner une idée de la renommée de la série, le fameux Duke Togo (le "héros") dont les épais sourcils froncés sont devenus un symbole immédiatement reconnaissable (et les parodies n'arrêtent plus, si vous lisez No Longer Heroine, vous n'avez pas pu les rater) fait partie du patrimoine culturel japonais au même titre que Ryô, le policier de Kochikame.
Mini-conclusion.
Même quand il s'agit de mixer personnages japonais et personnages francophones, nos amis japonais ne manquent pas de répondant comme en témoigne surtout Drifters qui met quand même en scène des sommités historiques internationales ou encore Afterschool Charisma qui tente de les imaginer pendant leur vie au collège. Cette capacité à se rapproprier des symboles étrangers se voit d'ailleurs presque mieux dans l'animation mais ça, c'est le sujet de mardi prochain.